Non à la campagne de diffamation et de censure dirigée contre les réunions antiguerre sur les campus canadiens

Vous êtes étudiant dans une université canadienne? Aidez-nous à vaincre les tentatives de censurer les actions antiguerre sur les campus en contactant le Mouvement international des jeunes et des étudiants pour l’égalité sociale (IYSSE) et en participant sa lutte pour construire un mouvement antiguerre international dirigé par la classe ouvrière. Écrivez-nous à iyssecanada@gmail.com pour en savoir plus.

***

Le radiodiffuseur national canadien claironne une campagne de diffamation de droite visant à faire taire toute voix critique à l’égard de la guerre contre la Russie, déclenchée par les États-Unis et l’OTAN au sujet de l’Ukraine: une guerre dans laquelle l’impérialisme canadien joue un rôle extrêmement belliqueux et provocateur.

La chasse aux sorcières est menée par le Congrès des Ukrainiens canadiens (UCC). L’UCC entretient des liens étroits avec l’État canadien depuis des décennies et, avec l’aide d’Ottawa, a blanchi le rôle joué par les nationalistes ukrainiens en tant que collaborateurs des nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. Il promeut depuis longtemps une forme de nationalisme ukrainien d’extrême droite, virulemment anticommuniste et antirusse.

La campagne de la CBC a été lancée par un reportage du 3 février intitulé «Le vandalisme et le harcèlement anti-ukrainiens en hausse dans les universités canadiennes», qui ne fournissait aucune preuve pour justifier son titre lugubre. S’appuyant sur des déclarations de l’UCC d’extrême droite, l’article dépeignait tous les opposants à la guerre impérialiste menée par les États-Unis contre la Russie comme de violents racistes prorusses.

Le conseiller principal en politique de l’UCC, Orest Zakydalsky, a affirmé que les Ukrainiens «ont été témoins d’une augmentation des attaques physiques et de la violence», sans faire concrètement référence à un seul incident violent. L’UCC a demandé au gouvernement canadien de créer un «groupe de travail» maccartiste pour enquêter sur ces attaques – c’est-à-dire pour diffamer, intimider et réduire au silence toute personne qui ferait la lumière sur les objectifs de guerre prédateurs de l’impérialisme canadien et de ses alliés de l’OTAN ou la politique fasciste de leurs mandataires nationalistes ukrainiens.

La vice-première ministre Chrystia Freeland pose avec une bannière fasciste [Photo: SputnikNews/WyattReed]

Si l’UCC se sent enhardie au point d’exiger la censure par l’État des voix antiguerre sur les campus, c’est avant tout en raison des liens étroits qu’elle entretient depuis des décennies avec l’État canadien. La vice-première ministre Chrystia Freeland, petite-fille d’un fasciste ukrainien et d’un collaborateur nazi, entretient des liens étroits avec l’UCC depuis son enfance. Elle incarne l’alliance entre le nationalisme d’extrême droite ukrainien et l’impérialisme canadien. Taras Zalusky, qui a été PDG et directeur général de l’UCC de 2010 à 2016, a récemment été nommé chef de cabinet de la ministre de la Défense Anita Anand à l’initiative du cabinet du Premier ministre.

L’UCC a profité d’une réunion organisée le 26 janvier par le Conseil de la paix d’Ottawa à l’Université Carleton pour lancer sa campagne de diffamation et de censure des actions et de l’agitation antiguerre. Intitulé «La guerre en Ukraine: Quel est le chemin vers la paix?», l’événement a réuni l’activiste et éminent journaliste indépendant Yves Engler et l’ancien candidat à la direction du Parti vert et «écosocialiste» autoproclamé Dimitri Lascaris. Les participants à la réunion ont critiqué à juste titre le rôle provocateur des puissances occidentales dans le déclenchement de la guerre, mais ont fini par lancer un appel pathétique au gouvernement canadien pour qu’il reconsidère son soutien à la guerre contre la Russie et qu’il négocie des pourparlers de paix.

Lors d’un autre incident à l’université de Victoria, en Colombie-Britannique, la Société des étudiants ukrainiens réussit à déclencher une enquête universitaire sur la Ligue des jeunes communistes, après que le mouvement de jeunesse du Parti communiste stalinien a critiqué une bannière portant le slogan fasciste «Slava ukraini!» Ce slogan a été popularisé par l’Organisation des nationalistes ukrainiens de Stepan Bandera, qui a collaboré avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale et est responsable du massacre de centaines de milliers de Juifs et de Polonais. L’université a déclaré à propos des critiques de l’UCJ: «Ce comportement n’est pas – et ne sera pas – toléré...»

L’UCC a encouragé son affilié Ukrainian Students à Carleton à tenter d’empêcher la tenue de la réunion du 26 janvier. En faisant appel à la sécurité du campus et au «Department of Equity and Inclusive Communities», les membres des Ukrainian Students se sont plaints que les formulaires appropriés n’avaient pas été soumis. Ils ont aussi effrontément dénigré Engler, en lançant l’accusation absurde mais profondément sinistre qu’il «pourrait être à l’origine de harcèlement ou de violence envers les étudiants lors de l’événement». La sécurité du campus «nous a promis que des agents de police seraient placés aux portes... pour s’assurer que l’événement serait arrêté avant qu’il ne commence», a affirmé plus tard le club étudiant. Toutefois, l’administration de l’Université Carleton, invoquant l’importance de la liberté d’expression, est intervenue et la réunion a eu lieu.

Après la réunion, les étudiants de l’UCC ont délibérément déformé les propos des intervenants. Le club étudiant a accusé les panélistes de «promouvoir la haine» et de servir de «porte-parole de la propagande russe». La CBC a repris sans critique ces allégations, qui ont circulé dans une lettre ouverte sur Facebook.

Le groupe a accusé l’Alliance pour la paix de diffuser «la propagande et la désinformation russes», ajoutant sans la moindre preuve qu’elle «semble être financée par des intérêts russes».

La lettre accuse Engler de «promouvoir la désinformation» simplement en raison de ses apparitions passées sur RT, le diffuseur parrainé par le Kremlin qui a été interdit par le CRTC au début de la guerre. Les étudiants ukrainiens n’ont pas cité une seule déclaration d’Engler.

En outre, le groupe a tenté d’établir un lien entre l’appel des intervenants à des pourparlers de paix et le soutien à l’État russe et la «haine» violente dirigée contre les Ukrainiens. Il a publié deux photos de graffitis prorusses grossiers, avec les mots «Rossiya» et la lettre majuscule «Z» griffonnés au stylo sur un mur, laissant entendre qu’il s’agissait de l’œuvre d’organisateurs antiguerre.

Il n’existe absolument aucune preuve permettant de relier ces graffitis à des participants à la réunion, et encore moins à ses organisateurs. Ces gribouillages pathétiques sont bien plus susceptibles d’être une provocation des membres de l’UCC de droite eux-mêmes. La police d’Ottawa a enquêté sur leurs allégations et n’a trouvé aucune preuve à leur appui.

Déclarant que les intervenants avaient «encouragé le génocide contre le peuple ukrainien» – un autre mensonge immonde – le groupe a poursuivi que «le manque de sécurité dans la salle et sur le parking après l’événement a conduit les étudiants à se sentir incroyablement peu en sécurité pour exprimer leurs opinions et rentrer chez eux».

Des reporters du World Socialist Web Site ont assisté en ligne à l’événement du 26 janvier. Les seuls «intimidations et harcèlements» pendant la réunion ont été le fait d’étudiants nationalistes ukrainiens, qui ont tenté de faire taire les intervenants.

Engler a fait un récit factuel de l’expansion de l’OTAN vers l’est, vers les frontières de la Russie, après la dissolution de l’Union soviétique par la bureaucratie stalinienne, et de l’utilisation par Washington et Ottawa de forces fascistes comme fer de lance du coup d’État de Maidan en 2014, qui a renversé le président prorusse élu du pays. Lascaris, pour sa part, a cité l’expérience de sa famille sur l’île divisée de Chypre pour dénoncer le rôle de l’impérialisme américain dans la région. Le principal appel d’Engler a été de demander à la classe dirigeante canadienne de reconsidérer sa politique: «Si vous regardez le contexte, dans lequel le Canada a participé activement à l’intervention dans les affaires ukrainiennes... tout cela est important pour mettre fin à cette guerre et pousser à des négociations.»

Cette désorientation politique découle de la politique de l’Alliance canadienne pour la paix, au sein de laquelle les dirigeants du Parti communiste stalinien (PCC) du Canada côtoient depuis des décennies les pacifistes chrétiens et autres. La réunion du 26 janvier était présidée par Miguel Figueroa, qui a dirigé le PCC stalinien pendant plus de deux décennies. Sa perspective de faire pression sur la classe dirigeante est une reprise de la campagne des staliniens de l’époque de la guerre froide en faveur de la «coexistence pacifique» entre l’URSS et l’impérialisme et pour que le capitalisme canadien adopte une soi-disant «politique étrangère indépendante». Alors qu’ils dissolvaient l’Union soviétique et se transformaient en une nouvelle classe capitaliste, les bureaucrates staliniens dirigeants s’imaginaient pouvoir réintégrer pacifiquement la Russie dans l’économie mondiale dominée par les impérialistes sur la base de relations sociales capitalistes restaurées. L’encerclement systématique de la Russie par les impérialistes, l’instigation de la guerre actuelle et la réponse réactionnaire de Poutine, fondée sur la guerre et le chauvinisme grand-russe, ont montré à quel point ils s’étaient désastreusement trompés.

Le fait que la CBC se fasse le champion des appels à la censure de propositions de pourparlers de paix aussi timides que celles avancées lors de la réunion du 26 janvier montre à quel point l’élite dirigeante du Canada est terrifiée par l’émergence potentielle d’un mouvement antiguerre de masse dans la classe ouvrière. Ils reconnaissent que des millions de travailleurs à travers le pays ont du mal à joindre les deux bouts alors que les prix montent en flèche et que les services publics et les salaires sont réduits à leur plus simple expression pour financer les milliards de dollars nécessaires à la guerre contre la Russie. Ils craignent à juste titre qu’une discussion politique ouverte sur les origines de la guerre, ainsi que sur le bilan sanglant du Canada et des autres puissances impérialistes et de leurs mandataires ukrainiens d’extrême droite, n’encourage les étudiants et les jeunes à s’engager dans la lutte contre la guerre et le système de profit capitaliste qui lui a donné naissance.

Tiré du Winnipeg Free Press du 18 octobre 1949, page 1. Deux articles rapportent comment des centaines de collaborateurs nazis ukrainiens ont attaqué une réunion publique au Ukrainian Labour Temple de Winnipeg avec du verre brisé, des pierres et des barres de fer, tandis que la police restait là, sans intervenir. [Photo: Winnipeg Free Press archive.]

Le gouvernement libéral n’a pas indiqué s’il allait reprendre la proposition de l’UCC de créer un «groupe de travail» chargé de contrôler et de censurer les événements sur les campus. Mais l’État canadien a une longue histoire de collaboration avec les nationalistes ukrainiens d’extrême droite pour cibler l’opposition de gauche dans la classe ouvrière. Comme le WSWS l’a exposé dans la série «Les amis fascistes de l’impérialisme canadien», l’UCC a elle-même été créée par le gouvernement canadien en 1941 afin de soutenir les objectifs de l’impérialisme canadien pendant la Seconde Guerre mondiale. Après la guerre, l’État canadien a utilisé les collaborateurs fascistes nouvellement arrivés de la division Waffen SS Galizien, de l’Organisation des nationalistes ukrainiens et de l’Armée insurrectionnelle ukrainienne de Bandera comme instruments de sa politique étrangère et intérieure de la guerre froide. Soutenues par l’État canadien, ces forces d’extrême droite ont été utilisées pour disperser violemment les réunions et les piquets de grève des travailleurs, et pour déplacer la politique de la diaspora ukrainienne, jusqu’alors largement associée au socialisme, vers la droite.

L’UCC est aujourd’hui dirigé par les descendants politiques et familiaux de ces collaborateurs fascistes. Le club ukrainien de Carleton est affilié au SUSK ou Cоюз Українськoгo Студентства Канади, l’Union des étudiants ukrainiens canadiens fondée en 1953 comme camp d’entraînement politique pour les étudiants militants de l’UCC. Leur campagne de diffamation immonde contre l’Alliance canadienne pour la paix s’inscrit fermement dans la tradition de l’UCC. Tous les étudiants et les travailleurs doivent exiger l’arrêt immédiat de ces intimidations et défendre le droit des étudiants et des jeunes d’organiser des événements publics en opposition à la guerre en Ukraine et à l’impérialisme sans crainte de représailles ou de campagnes de diffamation politique.

L’influence politique croissante de l’UCC au sein de l’État canadien découle de la confluence de sa politique fasciste avec la guerre impérialiste contre la Russie, qui est la tentative de l’élite dirigeante de «résoudre» la crise croissante du capitalisme mondial par la conquête militaire. La guerre de l’OTAN en Ukraine, comme le souligne la campagne qui ne cesse de s’intensifier pour dépeindre la Chine comme une menace imminente, n’est que le coup d’envoi d’une troisième guerre mondiale pour la redivision impérialiste du monde.

Les mêmes conditions objectives qui poussent l’élite dirigeante à la guerre poussent des millions de travailleurs du monde entier à lutter contre elle. Le Mouvement international des jeunes et des étudiants pour l’égalité sociale (IYSSE) se bat pour armer les jeunes avec la perspective socialiste et internationaliste qui est nécessaire pour construire un mouvement antiguerre de masse dans la classe ouvrière pour mettre un terme à la guerre impérialiste.

Dans une déclaration précédant le rassemblement mondial contre la guerre qui s’est tenu le 10 décembre 2022, l’IYSSE a écrit: «Tout comme c’est la Révolution russe, la plus grande intervention de la classe ouvrière dans l’histoire mondiale, qui a mis fin au premier carnage mondial de la Première Guerre mondiale, ce sera l’intervention de la classe ouvrière internationale qui arrêtera aujourd’hui l’escalade vers la Troisième Guerre mondiale.»

(Article paru en anglais le 23 février 2023)

Loading